L’électricité et les ordures
Par les temps qui courent, d’aucuns diront que c’est une belle métaphore pour faire allusion aux responsables de la gestion désastreuse du secteur de l’électricité au Sénégal. Ces dirigeants qui, à cause de leur incompétence (ou manque de volonté politique), notre pays est plongé dans un noir tel qu’un chat aurait du mal à y retrouver ses chatons. Ces directeurs qui se sont alternés à la tête de la Senelec (la Société nationale d’électricité) cette décennie sans réussir à nous fournir le courant alternatif de façon continue. On le sait, le Sénégal traverse, en ce moment, la pire crise énergétique de son histoire.
C’est dans un tel contexte que des projets de production d’énergie électrique par les ordures ménagères ont vu le jour. Il s’agit donc des ordures comme on en trouve dans la plus grande et la plus célèbre décharge du pays : Mbeubeuss. C’est sans doute pour s’inspirer de ce qui s’est fait avec la décharge de Payatas à Manille aux Philippines où des ingénieurs ont pu, grâce cette montagne d’ordures, créer de l’électricité qui alimente les quartiers des alentours.
En effet, les ordures en décomposition dégagent un gaz très polluant : le méthane, de formule chimique CH4. Ce gaz, sous une certaine pression peut servir de combustible pour faire tourner des alternateurs afin de générer du courant.
Dans la décharge de Payatas, les techniciens ont enfoui près de 60 tubes en plastique à plus de 20 mètres de profondeur pour en ressortir le méthane. Le gaz fait tourner une énorme turbine placée à une centaine de mètres et reliée à un alternateur. L’installation produit ainsi entre 250 et 500 kilowatts. Selon les experts, il y aurait suffisamment de méthane pour créer du courant pendant 10 ans.
Un projet de ce genre est en cour d’étude depuis 2008 avec la décharge de Mbeubeuss qui accueille près de 475 000 tonnes de déchets par an. S’il arrivait à terme, les populations des communes environnantes (Malika, keur Massar…) seront sans doute épargnées des délestages qui font rage en ce moment. De plus, ce sera un avantage certain sur le plan environnemental. Le méthane étant un gaz à effet de serre toxique, sa récupération avant qu’il ne se répande dans l’atmosphère participe à la lutte contre le réchauffement climatique. Reste à espérer que le projet ne dorme pas indéfiniment dans les tiroirs.
En attendant, le sénégalais continuent de broyer du noir avec des quartiers de plus en plus délestés et la Sénélec de plus en plus détestée. Obligés d’écouter les discours peu convaincants des autorités annonçant des mesures et des dates butoirs pour la fin des délestages. Didon ! Et si, au Sénégal, le secteur l’électricité était géré par des “ordures” ?
Arouna BA
Commentaires